Dans quel monde de merde vit-on pour que la sortie d’un Strider ne soit qu’une actu parmi tant d’autre ; pour être reléguée au second plan face à un jeu South Park ou un remake – raté – de Thief? Hélas, il n’y a aucune réponse d’ordre logique.
Jay
Oui car il est quand même important de rappeler qu’au même titre que son «ancêtre de cœur» Bionic Commando, Strider est un monument du jeu d’action en plus d’être parmi l’un des plus grands succès de Capcom à l’ère pré-Street Fighter II. Né à la toute fin des années 80, il correspondait à un projet «cross-media» comprenant un manga et évidemment des jeux. Une version NES basée sur le manga mais qui ne nous intéresse guère aujourd’hui (bien qu’il était très bon) et une version Arcade démentielle bien que trop courte, qui a ensuite connu ses heures de gloire sur différents ordinateurs et consoles dont des versions Megadrive et PC-Engine qui resteront dans les annales.
Du coup, il paraissait invraisemblable de ne pas attendre au tournant ce qui a été – mal – vendu par Capcom comme un remake du premier épisode. Car il est bien plus.
L’ADN du genre Action
Strider, en réalité, est un hommage à la série dans son ensemble (dont Strider 2 sorti en 99 notamment sur PlayStation) mais aussi et surtout une déclaration d’amour de Double Helix (qui remonte un peu dans notre estime depuis le Killer Instinct Xbox One) au genre action. Celui d’hier et d’aujourd’hui.
Ainsi, plutôt que de se contenter de plaquer de jolies textures sur un titre qui se boucle en 30 minutes après des myriades de die&retry lié à un level design presque injuste, Double Helix a réfléchi à l’ADN du genre Action et dans quelle mesure il était possible de faire un jeu moderne, beau, prenant mais toujours aussi rapide, survolté et défoulant. En d’autres termes, comment réussir à faire un vrai Strider 2014 sans trahir son matériau d’origine et que lui apporter de plus pour qu’il transcende littéralement ses ancêtres.
Un Metroidvania mais pas que
Le jeu est enfin cohérent : on ne se balade plus aux quatre coins du monde mais dans une ville géante qui n’est autre que la Kazakh d’origine, désormais magnifique mégalopole avec coins et recoins, bases militaires, renfermant dans ses profondeurs un temple, une prison, un centre de traitement d’eau etc. Tout est relié et parfaitement logique, de sorte à constituer une sorte de Metroidvania, assez proche dans sa construction du récent (enfin plus vraiment) Shadow Complex. Ainsi, il ne s’agit plus – uniquement – de foncer tête baissée en défonçant tout ce qui passe, de sauter, de grimper à des murs, de subir la gravité et d’utiliser des avatars animaux pour détruire l’armada de soldats, de monstres mécaniques et autres tourelles de défense.
A présent, le level design est tortueux et renferme un grand nombre de cavités, de passages, de réduits et autant de salles accessibles uniquement grâce à des capacités spécifiques que l’on obtient au fil de la progression : plusieurs natures élémentaires pour le Cipher, l’arme au corps à corps ; l’arme de lancer, les kunais et même plusieurs mouvements comme la glissade ou le double-saut. Un véritable Metroidvania donc. Cependant, Strider convie à être exploré, il n’oblige jamais à.
Un vrai Strider
Son but premier reste de sanctifier les oripeaux de ces aïeuls à savoir un jeu d’action décomplexé et hyper fun où les morceaux de bravoure ne manquent pas et/ou le fan de la série se régalera de retrouver des musiques, des décors revus et corrigés ou bien les boss comme le trio des artistes martiales ou encore Solo, le «Bobba Fett» de Strider. Sans compter un grand nombre de clins d’œil, notamment des items pixelisés comme à l’époque, permettant d’obtenir des «costumes» aux capacités propres ou des informations sur l’univers.
Si l’on peut reprocher parfois un manque de décors en extérieur, la disparition de quelques niveaux (la jungle avec les dinosaures du premier, le «château fort» du second) et des ennemis peu variés et parfois vraiment lourdingues et l’absence d’un new game +, Strider est un bonheur de tous les instants qui verse autant dans la nostalgie fin 80 que ce qui s’est fait de mieux fin 90/début 2000 (Castlevania époque Igarashi) voire même maintenant (Mark of the Ninja, Bionic Commando REarmed, Shadow Complex) ; à la limite du kitsch mais assumant parfaitement son respect presque outrancier du matériau de base.
Les Options sont toujours présentes dans le jeu. Ici, le robot/satellite et la Panthère.
Rejouabilité
D’autant qu’il faut compter plusieurs heures pour le boucler la première fois (contre 30 minutes pour la version d’origine et une bonne heure pour Strider 2), si tant est que l’on soit un peu curieux et que revenir en arrière pour dénicher l’item impossible à atteindre auparavant est un sacerdoce. Tellement bon et agréable à jouer (lorsque l’on connait les lieux, il est possible de vraiment speeder et traverser l’intégralité de la carte en moins de 10 minutes, totalement jouissif) qu’il est invraisemblable de ne pas y revenir, ne serait-ce que pour améliorer ses performances en tant que destructeur mais aussi en tant qu’acrobate. Des défis que l’on se posait à nous-même du temps où les succès n’existaient pas encore en somme ; bien qu’ils soient présents et que des missions annexes de parcours ou de survie sont à débloquer.
En bref, si vous aimez les jeux d’action à forte tendance WTF, qui poussent à l’exploration comme n’importe quel Metroidvania, que vous appréciez la cohérence d’un univers, que les héros classes ne sont pas un problème pour vous, il est impératif de vous procurer cette merveille qui s’approprie l’ADN du genre action sur les vingt dernières années tout en sanctifiant au mieux l’un de ses plus prestigieux représentants d’autrefois.
Et qu’est-ce que 15 euros pour des heures de bonheur et un plaisir toujours renouvelé?
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